Vous vous sentez exténué·e, démotivé·e ou complètement à côté de votre travail ? Vous avez peut-être déjà entendu parler de ces trois maux au nom anglais : burn-out, bore-out, brown-out. Mais savez-vous vraiment ce qui les distingue ? Et surtout… si vous êtes en train d’en vivre un ?
Ces syndromes, bien qu’ils aient des racines et des manifestations différentes, ont une chose en commun : ils peuvent gravement impacter votre santé physique et mentale. Alors autant apprendre à les reconnaître, pour mieux les prévenir — ou en sortir.
Le burn-out : quand l’épuisement devient perte de sens
Le terme « burn-out » est apparu aux États-Unis dans les années 1970, pour décrire l’épuisement émotionnel des soignants. Depuis, il s’est élargi à tous les métiers où l’on donne beaucoup de soi.
L’OMS le définit comme un syndrome résultant d’un stress chronique au travail qui n’a pas été géré avec succès.
Mais attention : le burn-out ne se limite pas à “trop de travail”. Il survient souvent lorsqu’un conflit de valeurs s’installe. Vous voulez bien faire, mais les conditions de travail ne vous le permettent pas. Vous perdez le sens de ce que vous faites, et cela vous ronge.
Les trois grands symptômes du burn-out :
- Un épuisement profond, physique et mental ;
- Une vision négative de son travail, qui devient source de désillusion, voire de cynisme ;
- Un sentiment d’inefficacité et de ne plus rien accomplir d’utile.
Attention, le burn-out, ce n’est pas :
- Seulement du stress, même chronique.
- Une addiction au travail, même si celle-ci peut y conduire.
- Une dépression, bien que l’un puisse entraîner l’autre.
Les causes ? Elles sont souvent systémiques.
Selon l’INRS et l’ANACT, les facteurs de risque sont d’abord à chercher du côté de l’organisation du travail, de l’environnement, et des relations professionnelles. Parmi les plus fréquents :
- Une charge excessive de travail,
- Des horaires étendus,
- L’isolement, le manque de soutien,
- Une qualité empêchée, quand on ne peut pas faire du bon travail malgré son envie.
À cela s’ajoutent des facteurs individuels : être très engagé·e, perfectionniste, se définir fortement par son métier… autant de caractéristiques qui, dans un contexte toxique, augmentent le risque.
Et pourtant, quand ça arrive, on culpabilise. On se dit qu’on aurait dû faire mieux. On pense que c’est “notre faute”. Alors que la racine du problème est souvent structurelle. En parler à quelqu’un de compétent permet souvent de faire le tri entre ce qui relève de nous… et ce qui ne dépend pas de nous.
Attention à la « grenouille dans l’eau tiède »
Vous connaissez la fable ? Plongez une grenouille dans de l’eau chaude : elle saute. Plongez-la dans de l’eau tiède qu’on chauffe progressivement… elle reste, s’engourdit, et finit ébouillantée.
C’est exactement ce qui se passe dans un burn-out : les signaux s’installent lentement, on s’habitue à l’inconfort, on s’accroche… jusqu’au point de rupture.
Des signes à ne pas ignorer :
- Cognitifs : difficultés de concentration, mémoire en berne, prise de décision laborieuse ;
- Comportementaux : repli sur soi, irritabilité, addictions ;
- Physiques : fatigue persistante, troubles du sommeil, douleurs diverses ;
- Émotionnels : perte de confiance, anxiété, hypersensibilité, tristesse, voire une absence totale d’émotion.
Souvent, ce sont l’entourage personnel ou les collègues qui repèrent les premiers changements. N’hésitez pas à leur faire confiance s’ils s’inquiètent pour vous.
Comment réagir ?
Tout dépend de la gravité. Dans les cas les plus lourds, un arrêt de travail est indispensable pour se reposer, physiquement et psychiquement. Une thérapie, parfois accompagnée de médicaments, peut être nécessaire.
Mais se reposer ne suffit pas : il faut changer ce qui ne va pas dans le travail. Car ce n’est pas un simple surmenage. C’est une blessure identitaire. Le retour doit être progressif, encadré, et surtout, sur des bases différentes.
Le bore-out : l’ennui qui rend malade
À l’inverse du burn-out, le bore-out naît de l’ennui chronique au travail. Moins connu, mais tout aussi pernicieux.
Créé en 2007, ce terme décrit un mal sournois : ne pas avoir assez à faire, ou faire des choses sans intérêt, finit par saper l’énergie vitale.
On pourrait croire que « ne rien faire » est reposant. En réalité, cela use profondément, parce que le besoin de sens et d’utilité est fondamental pour nous, êtres humains.
Les symptômes ? Comme pour un burn-out :
- Fatigue chronique, malgré peu d’activité ;
- Troubles du sommeil et de l’humeur ;
- Comportements compensatoires : alimentation, alcool, drogues ;
- Risques accrus de maladies cardiovasculaires (jusqu’à 3 fois plus ! selon l’étude « Bored to Death »).
Quelles sont ses causes ?
En dehors des cas de « mises au placard » avérés[9], les causes du bore-out peuvent être multiples :
- Surqualification : vous pourriez faire beaucoup plus, mais on ne vous le demande pas.
- Sous-charge de travail : vous avez du temps… trop de temps.
- Tâches répétitives ou absurdes ;
- Aucune évolution ni nouveauté ;
- Une sensation de perdre votre temps au quotidien.
Le bore-out peut donc aussi concerner des personnes qui ont une charge de travail normale, mais qui se sentent enfermées, sans espoir d’évolution, dans des missions qu’elles connaissent par cœur, qu’elles finissent par accomplir de manière presque mécanique et/ou qui n’ont pas -ou très peu – d’intérêt et de sens pour elles.
Comment réagir ?
Nommer le problème. Difficile, car on culpabilise souvent (« Je suis payé·e à ne rien faire, je ne devrais pas me plaindre… »).
En parler à quelqu’un de confiance : collègue, médecin du travail, représentant du personnel.
Faire le point avec sa hiérarchie, si possible, pour envisager des ajustements.
Et si rien n’évolue ? Changer de poste, d’organisation… voire de voie professionnelle.
Le brown-out : quand tout devient absurde
C’est le syndrome du non-sens. Le brown-out survient quand on ne comprend plus à quoi sert son travail, ou quand il est contraire à ses valeurs.
Le mot vient du jargon électrique : une chute de tension. Celle qu’on ressent quand on doit faire des tâches absurdes, inutiles, ou incohérentes avec ce que l’on est.
David Graeber a nommé cela les « bullshit jobs » :
- Les faire-valoir, dont la présence sert surtout à flatter l’égo du supérieur ;
- Les sbires, embauchés parce que « les autres en ont un » ;
- Les rafistoleurs, qui réparent des problèmes évitables ;
- Les cocheurs de cases, pour faire illusion ;
- Les petits chefs, qui surveillent des gens autonomes.
Et même si tout ça peut prêter à sourire… les conséquences sont sérieuses : démotivation, retraits progressifs, troubles psychologiques, parfois arrêt de travail prolongé.
Le brown-out concerne aussi des personnes surqualifiées pour leur poste, ou celles à qui on offre une « fausse promotion » : un beau titre, mais aucune marge d’action réelle. Le décalage entre les mots et les actes finit par miner l’estime de soi.
Que faire en cas de brown-out ?
- Identifier le malaise : est-ce l’absurdité des tâches ? Le manque de reconnaissance ? L’écart entre vos valeurs et ce qu’on vous demande ?
- Explorer les possibilités d’évolution internes.
- Sinon, comme pour le bore-out : changer de cadre ou de voie peut devenir une nécessité.
Et vous, où en êtes-vous ?
Prenez un instant. Posez-vous ces trois questions :
- Est-ce que mon travail a du sens pour moi ?
- Est-ce qu’il me permet de progresser, d’apprendre, de créer ?
- Est-ce que je me sens utile, reconnu·e, légitime ?
Si vous répondez « non » à une ou plusieurs de ces questions, il est peut-être temps d’écouter cette alerte intérieure.
Se réaliser au travail, ce n’est pas un luxe. C’est une condition de santé. Et parfois, il suffit d’oser poser les bonnes questions pour commencer à changer ce qui doit l’être.
Vous n’êtes pas seul·e. Si vous souhaitez être accompagné·e dans cette exploration, je suis là pour vous écouter et vous guider.